Pourquoi la ville ?
L’anthropologie pour mieux comprendre la Smart City
Pour approfondir la question et en appui de ce qu’expose le Dr Laurence Vanin, vous trouverez ci-dessous des textes qui vous permettront de mieux appréhender le sujet.
Mircea Eliade évoque dans son ouvrage Le sacré et le profane, 1957 (trad. fr. 1965, Gallimard) le fait que l’espace sacré et la sacralisation du Monde sont liés. Effectivement, « Pour l’homme religieux, l’espace n’est pas homogène ; il présente des ruptures, des cassures : il y a des portions d’espace qualitativement différentes des autres. “N’approche pas d’ici, dit le Seigneur à Moïse, ôte les chaussures de tes pieds ; car le lieu où tu te tiens est une terre sainte“ (Exode, III, 5). Il y a donc un espace sacré, et par conséquent “fort“, significatif, et il y a d’autres espaces, non-consacrés et partant sans structure ni consistance, pour tout dire : amorphes. Plus encore : pour l’homme religieux, cette non homogénéité spatiale se traduit par l’expérience d’une opposition entre l’espace sacré, le seul qui soit réel, qui existe réellement, et tout le reste, l’étendue informe qui l’entoure. »
Le Corbusier, Urbanisme, Crés et Cie, 1925 (rééed. Flammarion, 1994) « Dans la nature chaotique, l’homme pour sa sécurité se crée une ambiance, une zone de protection qui soit en accord avec ce qu’il est et avec ce qu’il pense ; il lui faut des repères, des places fortifiées à l’intérieur desquelles il se sente en sécurité ; il lui faut des choses de son déterminisme. Ce qu’il fait, c’est une création et celle-ci contraste d’autant plus avec le milieu naturel que son but est plus près de la pensée et plus éloigné, plus détaché du corps. On peut dire que plus les œuvres humaines s’éloignent de la préhension directe, plus elles tendent à la pure géométrie […] la ville est pure géométrie. Libre, l’homme tend à la pure géométrie. Il fait alors ce que l’on appelle de l’ordre. L’ordre lui est indispensable, sinon ses actes seraient sans cohésion, sans suite possible. Il y ajoute, y apporte, l’idée d’excellence. Plus l’ordre est parfait, plus il est à l’aise, en sécurité. » (p. 20-22)
Aristote considère que : « La Cité est une certaine quantité de maisons, de terres et de biens, suffisants pour assurer une vie heureuse. C’est là une chose manifeste, car, dès qu’on n’est plus capable d’atteindre cette fin, la communauté elle aussi se dissout. » Les Economiques § 10.
« L’humanité est entrée dans une nouvelle phase de son évolution en 2007. A partir de cette date, la majorité de la population humaine devient urbanisée et c’est l’arrivée du smartphone ; depuis, les urbanistes sont à la recherche de la smartcity. Nouvelle Atlantide ?
Les grands singes et les hommes, la famille des hominidés africains, aiment leur confort. Pendant des millions d’années de notre histoire naturelle, nos ancêtres et nos frères d’évolution ont construit des nids douillets dans les arbres pour y dormir, à l’abri des prédateurs et près des étoiles. Puis arrivent les premiers hommes, le genre Homo avec Homo erectus. Ils s’installent au sol et édifient des abris faits de branchages, de lianes, d’écorces et de grandes feuilles dont, hélas, on retrouve rarement les traces, si ce n’est les sols aménagés et les pierres de fondation ou de calage. Le feu arrive très vite ; l’invention du foyer dans toutes ses acceptions. En « tropicalisant » leurs habitats, les hommes se donnent les moyens de partir à la conquête de l’Ancien monde – Afrique, Asie, Europe – ce qui se fera assez vite. Puis arrive le temps de la sédentarisation qui ne concerne qu’une minorité de peuples passant de l’horticulture à l’agriculture. En fait, la sédentarité ne fait pas partie des aptitudes premières de l’humanité, bien au contraire, ce qui aura de sérieuses conséquences sur son évolution récente depuis l’aube de l’histoire. » Pascal Picq, Smart City, une autre lecture de la ville, Homo urbanimus, Ed Ovadia.